Titeuf ... suite
Les heureux maîtres d'un petit laissé pour compte (VI)
Sauvée par une farouche détermination et tout ce que cela pouvait impliquer en matière d'action, Titeuf allait pouvoir bénéficier des soins nécessaires à son état. Sa gingivite demeurait cantonnée aux incisives supérieures, ce qui était très bon signe. Et puis, elle devait confirmer dans sa famille d'accueil tout ce que les bénévoles pensaient d'elles : une minette tendre et attachante, qui très rapidement, sut conquérir le coeur de Gabrielle. Il suffisait de lire les nouvelles régulières données par sa Maman d'Alsace pour comprendre qu'il n'était plus certain que Titeuf vienne chez moi. C'était sans compter sur la mauvaise volonté de Mademoiselle Iéna qui allait lui mener la vie rude et tout faire pour faire comprendre à chacun, que cette intruse n'était pas la bienvenue. Un matin d'octobre, alors que le jour était encore loin d'être levé, Gabrielle eut à faire ses adieux à Titeuf, que j'amenais vers sa nouvelle vie, au terme d'un voyage de 1200 kilomètres... Sur le topic du sauvetage qui allait se clôre, un ultime message :
"Je voulais remercier toutes celles qui d'une manière ou d'une autre ont permis mon sauvetage et mes soins, avec une pensée toute particulière pour celle qui restera toujours ma maman d'Alsace, Gabrielle.
Je garderai pour toujours au fond de mon coeur comme des perles rares, chacune des larmes qui ont été versées ce matin lors de mon départ, tant à Mutzig qu'à la gare..."
A bientôt"...
TITEUF
Il m'appartenait désormais de m'attacher à cette petite minette que je n'avais ni vu ni voulu. Bien acceptée par mes autres chats, Titeuf, à sa manière, me disait toute sa joie de vivre et d'être là . D'autres n'auraient sans doute pas reçu ces signes avec autant d'attendrissement et de sérénité que moi, mais Gabrielle m'avait prévenu. N''avait-elle pas écrit "Titeuf est une chatte très vive : elle court dans tous les sens, saute, rentre dans l'armoire..." Et oui ! Titeuf était vive, courait bien dans tous les sens et sautait...
Elle était là, elle vivait, et octobre était doux...
A peine quelques jours,à peine trois petites semaines de bonheur avant le cauchemar. Où chercher la cause d'une si virulente attaque de calicivirose ? Le stress de ces deux derniers mois ? Le contact avec mon pauvre Arthur en pleine crise ? Peut-être. Je penche davantage pour ce rappel de vaccin effectué juste avant que j'aille la chercher. Je ne peux en tous cas que faire le rapprochement : comme pour Arthur, le calici se réveillait avec violence, juste un mois après ce vaccin qui impliquait une réinjection du virus. Elle cessa de s'alimenter et le vétérinaire découvrit une bouche ravagée par les ulcères. Je le sentis très pessimiste. Chaque matin durant quinze jours, je lui amenais Titeuf pour des injections d'antibiotiques Le succès n'était pas garanti, et sans guérison des ulcères, pas question de se lancer dans un inutile protocole interféron : les défences immunitaires semblaient à plat. Et je ne parle bien sûr pas de la méfiance à mon égard qui commença à se manifester chez Titeuf, contrainte chaque jour d'être conduite chez le vétérinaire. Elle perdait confiance en moi et plus les jours passaient, plus le pessimisme était de rigueur.
Dix jours après le début de ce traitement de cheval, rien ne semblait avoir bougé. Le mot d'euthanasie ne fut pas prononcé par mon vétérinaire lorsque j'évoquais la suite : des soupirs, des rictus, un aveu d'impuissance, cela suffisait à faire comprendre les choses sans les dire. On irait jusqu'au bout des quinze jours. Il restait cinq jours...
Et le quinzième jour, tout était cicatrisé. Titeuf, comme Arthur pouvait alors bénéficier de ces trois injections massives d'interféron à J+2. Pas plus que pour Arthur, je ne pouvais songer alors que nous étions partis pour au moins vingt-deux mois de rémission totale... et qu'un mois plus tard, je pourrais prendre cette photo du bonheur :
Titeuf et Arthur sont devenus inséparables. Est-ce de l'anthropomorphisme, que d'imaginer qu'ils ont pu se raconter leur maladie et leurs souffrances et ainsi s'attacher l'un à l'autre ? Arthur aime vadrouiller. Qunad il quitte l'enceinte de la maison, Titeuf s'installe et attend son retour. Ils se font alors de gros calins et viennent s'installer côte à côte sur le canapé du salon ou dans le petit cabanon au fond du jardin.
Acceptons toutefois l'idée plus prosaïque que l'un et l'autre recherchent simplement la compagnie de leurs congénères, ce qui n'est pas le cas de mes trois autres chats, plus indépendants et solitaires, et qu'ils se sont donc simplement trouvés...
Et quand je montre ces photos, celle de Titeuf à son arrivée chez moi et cette autre plus récente, on me dit de faire attention, tout en me parlant de régime...
Alors je souris, mais au fond de moi je pense : Mais laissez-la donc VIVRE !